Augmentation du potassium ou hyperkaliémie, les conseils d’un biologiste médical

Le dosage du potassium est une analyse extrêmement courante en laboratoire de biologie médicale. Elle est souvent réalisée à l’occasion de la réalisation d’un ionogramme ou encore d’un dosage isolé de potassium sur une prise de sang simple. La méthode principale de réalisation du dosage du potassium est la potentiométrie indirecte. Le potassium est principalement contenu à l’intérieur des cellules et le taux sanguin est faible par rapport au taux intracellulaire. Tout cela a une extrême importance car il existe de nombreux soucis préanalytiques par relargage du potassium intracellulaire dans le milieu sanguin (sérum ou plasma).

Potassium Élevé - Hyperkaliémie
Potassium Élevé – Hyperkaliémie

L’interprétation du potassium : un art très délicat. Les aléas à éviter avant toute prise en compte du résultat

Le résultat de potassium dépend du type de tube utilisé par le préleveur et/ou le laboratoire.

Le saviez-vous, le potassium peut être réalisé selon votre laboratoire sur un sérum ou sur un plasma hépariné. Cela a une incidence très importante sur l’interprétation des résultats.

Lors du prélèvement sur un tube sec, vous obtenez un sérum après coagulation du sang total. Cela implique un taux généralement plus élevé de potassium sur un tube sec que sur un tube hépariné où il n’y a pas de coagulation. C’est pourquoi les valeurs usuelles du potassium sur tube sec sont généralement de 3,5 à 5,1 mmol par litre.

Sur tube hépariné, en l’absence de coagulation avant analyse, les valeurs usuelles retenues sont généralement plus basses de 3,5 à 4,5 millimoles par litre.

Le saviez-vous ? En cas de thrombocytose, c’est-à-dire en cas d’augmentation des plaquettes à partir de 600 G/L, le potassium est surestimé sur tube sec par relargage du contenu intracellulaire des plaquettes lors de la coagulation. Certaines anomalies hématologiques engendrant une très forte augmentation du nombre de cellules, comme par exemple certaines leucémies lymphoïdes chroniques, peuvent également aboutir à ce genre de phénomène, avec une augmentation artéfactuelle du potassium en lien avec la coagulation ou le relargage du contenu intracellulaire en l’absence de coagulation.

Le résultat de potassium dépend également de l’endroit du prélèvement

En effet, le potassium est un composant intracellulaire très sensible au délai d’acheminement au laboratoire et aux conditions de température. Si vous êtes prélevé à domicile et que l’acheminement s’est fait au laboratoire pour une durée de plus de 4 à 6 heures, vous pouvez considérer qu’il y a une surestimation de votre potassium, y compris si aucune hémolyse n’est détectée par le laboratoire.

Par ailleurs, il est communément reconnu que les conditions hivernales sont de nature à faire surestimer votre potassium lorsque vous êtes prélevé à domicile, en effet le froid augmente le relargage de potassium en provenance des globules rouges et conduit à une surestimation par erreur du résultat de votre dosage.

Le résultat de votre potassium dépend de la qualité du prélèvement

En effet, la pause prolongée du garrot, plus d’une minute, ou les difficultés lors du prélèvement avec une recherche de veines, si celles-ci sont difficilement accessibles, peuvent aboutir à une augmentation artéfactuelle de votre taux de potassium et une interprétation erronée du dosage. Habituellement, dans ces circonstances, nous détectons au laboratoire une hémolyse mais celle-ci peut être indétectable et quand même aboutir à une augmentation artéfactuelle même si le sérum n’est pas détecté hémolysé.

Si le compte-rendu du laboratoire indique légère hémolyse ou hémolyse, le résultat de votre potassium est de toute façon surestimé par rapport à la réalité.

Si vous avez validé vos conditions pré-analytiques, c’est-à-dire éliminé tout problème avant analyse, nous pouvons enfin interpréter médicalement votre potassium.

Vous avez une véritable hyperkaliémie si le résultat du dosage est confirmé par un prélèvement sans garrot sur le bon tube le cas échéant et de préférence au laboratoire.

Dans ces cas, il faut rechercher la cause de l’augmentation et la rechercher rapidement car c’est une condition qui, en fonction de son importance, peut engendrer des troubles du rythme cardiaque avec un risque de décès.

Les principales causes d’augmentation réelles du potassium sont :

  1. Les excès d’apport. Si vous prenez par exemple une supplémentation en potassium type Kaleorid, vous pouvez aboutir à un excès de potassium dans le sang.
  2. Le défaut d’excrétion :
    • Si vous souffrez d’une insuffisance rénale aiguë ou chronique, vos reins ont du mal à éliminer le potassium, ce qui peut engendrer une augmentation du potassium de manière plus ou moins importante selon l’évolution de votre maladie rénale,
    • Si vous prenez certains traitements qui limitent l’élimination du potassium par le rein, par exemple les diurétiques épargneurs de potassium comme le spironolactone / Adlactone,
    • d’autres conditions médicales qui se regroupent sous la dénomination d’hypoaldostéronisme qui peuvent être liées à des maladies rénales, des maladies de dépôt comme l’amylose, le diabète, la maladie d’Addison ou encore la prise de traitement comme les inhibiteurs de l’enzyme de conversion ou les anti-inflammatoires non-stéroïdiens.
  3. L’hyperkaliémie de transfert, c’est-à-dire qu’il y a un transfert du compartiment intracellulaire vers le compartiment extracellulaire, donc in fine au sang. Cela peut se produire dans certaines situations, notamment en cas d’acidose métabolique, en cas de lyse cellulaire importante comme la rhabdomyolyse ou lors de la prise de digitaliques.

Mon dosage de potassium est élevé et semble juste, que dois-je faire ?

En cas d’élévation de dosage de potassium, si aucune cause d’erreur pré-analytique n’a pu être retrouvée, nous vous recommandons de consulter en urgence votre médecin afin d’en rechercher la cause. En effet, l’hyperkaliémie majeure, notamment au-delà de 6 mmoles par litre, est une urgence médicale qui doit être traitée en tant que telle. Vous pourriez également avoir des symptômes associés comme des troubles de rythme cardiaque ou des problèmes musculaires d’apparition récente et inexpliqués (diminution de la force par exemple). Si vous avez un dosage de potassium avec ce type de symptômes, l’urgence doit être vue par un médecin le jour même.

Attention, la très grande majorité des hyperkaliémies en laboratoire de ville sont liées à des soucis sur des prélèvements réalisés en dehors du laboratoire, dans des conditions qui ne sont pas toujours idéales et qui influent sur le résultat du dosage. Au moindre doute, nous vous recommandons le contrôle du dosage au laboratoire, de préférence sans garrot et de préférence en comparant le résultat sur sérum et sur plasma hépariné. Le prélèvement réalisé dans ces conditions garantit d’éliminer au mieux toutes les causes d’erreurs préanalytiques pouvant influencer négativement votre résultat et fausser son interprétation.

Questions fréquentes

Un taux de potassium élevé (hyperkaliémie) peut être causé par des excès d’apports en potassium (suppléments médicamenteux comme le Diffu-K ou le Kaléorid, alimentation riche en K+), un défaut d’excrétion rénale (insuffisance rénale, médicaments diurétiques épargneurs de potassium) ou un transfert du potassium des cellules vers le sang (acidose, lyse cellulaire, prise de digitaliques).

Plusieurs facteurs peuvent augmenter la kaliémie : une consommation excessive d’aliments riches en potassium, certains médicaments (supplémentation potassique comme le Diffu-K ou le Kaléorid, anti-inflammatoires, IEC, diurétiques d’épargne potassique…), une insuffisance rénale, une acidose métabolique, une hémolyse importante (lyse des globules rouges)…

En cas d’hyperkaliémie, il faut limiter les aliments très riches en potassium comme les fruits secs (abricots, figues, dattes, noix, amandes…), certains fruits (avocat, banane, kiwi…), les légumes verts (épinards, brocolis…), les pommes de terre, le chocolat, le café. Un régime pauvre en potassium peut être prescrit.

Pour faire baisser une hyperkaliémie, les mesures diététiques (réduire les aliments riches en K+) sont associées à un traitement médical si besoin : perfusion de glucose + insuline, résines échangeuses d’ions per os (Kayexalate), diurétiques de l’anse, dialyse dans les cas sévères…

Un taux de potassium supérieur à 5,1 mmol/L sur sérum et 4,5 mmol/L sur plasma est considéré comme une hyperkaliémie. Entre 5,5 et 6 mmol/L sur plasma, des signes ECG peuvent apparaître. Au-delà de 6 mmol/L sur plasma, il peut s’agir d’une urgence médicale pouvant engager le pronostic vital. Néanmoins, si la prise de sang a été réalisée en dehors du laboratoire et en l’absence de symptômes, il est nécessaire de contrôler le résultat avant toute inquiétude.

Une hyperkaliémie peut entraîner des troubles du rythme cardiaque potentiellement graves (visibles à l’ECG qui est un examen médical), une faiblesse musculaire, des paresthésies, des nausées voire des malaises ou une détresse respiratoire dans les formes sévères. Ces symptômes imposent une prise en charge médicale urgente.

En cas d’hyperkaliémie sévère, un traitement urgent en milieu hospitalier est nécessaire pour abaisser rapidement le potassium sanguin : insuline + glucose en IV pour faire rentrer le K+ dans les cellules, résines échangeuses d’ions per os pour capter le K+ dans le tube digestif, diurétiques de l’anse, dialyse…

Un excès de potassium peut avoir des effets secondaires potentiellement graves : troubles du rythme cardiaque (arythmies, bloc auriculo-ventriculaire…), paralysie musculaire, troubles digestifs… Une hyperkaliémie sévère (> 6 mmol/L sur plasma) peut engager le pronostic vital à court terme en fonction du contexte médical.

Une hyperkaliémie est une anomalie sérieuse, d’autant plus qu’elle est élevée. Au-delà de 6 mmol/L sur plasma, elle peut engager le pronostic vital par troubles du rythme cardiaque. Toute hyperkaliémie doit donc être contrôlée et prise en charge rapidement.

Le potassium est très sensible aux conditions de prélèvement. La pose prolongée (supérieure à une minute) d’un garrot peut entraîner une fausse élévation du potassium par relargage à partir des cellules musculaires. De même, les prélèvements en dehors du laboratoire sont plus à risque d’hémolyse et de faux positifs.

Les boissons très riches en potassium sont à limiter en cas d’hyperkaliémie comme les jus de fruits (orange, tomate…), le lait, le café, les colas, les boissons pour sportifs, les tisanes de fruits secs… L’eau et les sodas sans potassium sont à privilégier en cas d’hyperkaliémie.

Les aliments les plus riches en potassium sont les légumes secs (lentilles, pois chiches…), les fruits secs (abricots secs, dattes, figues, noix, amandes…), certains fruits (avocat, banane, kiwi…), le cacao et le chocolat noir.

Le taux de potassium normal se situe entre 3,5 et 5,1 mmol/L sur sérum et entre 3,5 et 4,5 mmol/L sur plasma hépariné. En dessous on parle d’hypokaliémie, au-dessus d’hyperkaliémie.

Oui, le chocolat, surtout noir (cacao), est très riche en potassium. Il est donc à consommer avec modération en cas d’hyperkaliémie ou de maladies ou conditions médicales pouvant favoriser l’apparition d’une hyperkaliémie.

La pseudohyperkaliémie résulte d’une élévation artificielle du potassium due à des erreurs de prélèvement ou de traitement de l’échantillon. Les causes incluent l’hémolyse (libération de potassium intracellulaire lors de la rupture des globules rouges), un délai excessif avant l’analyse, ou l’utilisation de garrots serrés trop longtemps pendant le prélèvement.

Pour confirmer le diagnostic, une nouvelle mesure est effectuée en suivant des protocoles stricts : éviter la pose d’un garrot si possible, utiliser des aiguilles de calibre adapté, et traiter rapidement l’échantillon. En cas de suspicion de causes génétiques (pseudohyperkaliémie familiale), des tests spécifiques sont requis.

Les anomalies électrocardiographiques évoluent avec la sévérité de l’hyperkaliémie :

  • K⁺ > 5,5 mmol/L sur plasma : Ondes T pointues et symétriques, raccourcissement de l’intervalle QT.
  • K⁺ > 6,5 mmol/L sur plasma : Élargissement du complexe QRS, disparition de l’onde P, et troubles de conduction pouvant évoluer vers une fibrillation ventriculaire ou une asystolie.

La présence de ces signes (qui ne sont visibles que lors de la réalisation d’un électrocardiogramme) nécessite un traitement immédiat, même en l’absence de symptômes cliniques.

Outre les mesures aiguës (insuline, résines), les patients à risque bénéficient de :

  • Veltassa (Patiromer) : Résine fixant le potassium dans le tube digestif, utilisée notamment chez les insuffisants cardiaques ou rénaux sous inhibiteurs du système rénine-angiotensine.
  • Lokelma (Cyclosilicate de sodium et de zirconium) : Alternative aux résines classiques, avec un effet plus rapide et moins d’effets gastro-intestinaux.
  • Adaptation médicamenteuse : Remplacement des diurétiques épargneurs de potassium par des diurétiques de l’anse, et réévaluation des inhibiteurs de l’ECA ou des ARA II.
  • Patients insuffisants rénaux : La clairance réduite du potassium majore le risque, surtout chez les diabétiques ou les personnes âgées.
  • Insuffisants cardiaques : Combinés à l’utilisation de médicaments hyperkaliémiants (éplérénone, spironolactone).
  • Patients sous polythérapie : Associations d’AINS, d’héparine, de bêtabloquants, ou d’immunosuppresseurs (tacrolimus).

Les épisodes aigus confirmés et symptomatiques nécessitent une hémodialyse en urgence, particulièrement si l’ECG montre des anomalies ou si la kaliémie dépasse 6,5 mmol/L sur plasma. En prévention, l’optimisation de la fréquence et de la durée des dialyses, associée à un régime pauvre en potassium (<2-3 g/jour), est cruciale.

  • Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) : Aggravation de l’insuffisance rénale fonctionnelle.
  • Inhibiteurs de l’ECA et ARA II : Réduction de l’excrétion rénale de potassium.
  • Diurétiques épargneurs de potassium (spironolactone, amiloride).
  • Immunosuppresseurs (tacrolimus, ciclosporine).

Il ne faut arrêter aucun de ces traitements en l’absence d’avis médical. Cette liste est présente pour information.

  • Contrôle mensuel de la kaliémie chez les insuffisants rénaux chroniques (DFG <30 ml/min) ou les patients sous médicaments hyperkaliémiants.
  • Bilan rénal régulier (créatinine, urée) pour ajuster les posologies médicamenteuses.
  • Éducation diététique : Limiter les aliments contenant plus de 200 mg de potassium par portion (ex : bananes, tomates, légumineuses).
  • Optimisation hydrique : Maintenir une diurèse >1,5 L/jour pour favoriser l’excrétion rénale.
  • Révision régulière des traitements : Éviter les associations à risque et privilégier les alternatives (ex : diurétiques de l’anse).

Dans la majorité des cas, l’hyperkaliémie reste asymptomatique. Néanmoins, notamment dans les élévations chroniques (ex : insuffisance rénale avancée), où l’adaptation progressive de l’organisme peut masquer les symptômes (adaptation de l’organisme). Cependant, le risque cardiaque persiste, justifiant un dépistage régulier.